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Newsletter du 2024-02-01

 
  Bonjour à tous,

Le sujet d’actualité du jour lié à l’agriculture reste "Les paysans sont en colère".

Mais comment en sommes nous arrivés lä ? Comment les progrès technologiques et le rêve de la production facile sans main d'oeuvre a conduit les agriculteurs à creuser leur propre tombe ? (bon, ils ont été bien aidés par la grande distribution et les états..).
A défaut de pouvoir résoudre à satisfaction le problème d'aujourd'hui, nous pourrions peut-être en tirer des enseignements et considérer ce qu'on nous vend sous le terme "progrès" avec un peu plus d'esprit critique et essayer de voir ce que le marketing ne nous dit pas et où cela pourrait nous mener. Et si la situation des agriculteurs d'aujourd'hui sera celle d'une part croissant de la population dans un avenir pas si lointain car leur travail peut se faire à moins cher ailleurs ou via des machines ?

Même si la situation est moins critique en Suisse d’une manière générale et dans le cas du maraîchage bio en particulier, nous aimerions apporter notre éclairage sur la question au fil de plusieurs mails (il y a trop à dire pour un seul…). Vous les retrouverez tous ici : https://www.clos-du-moulin.ch/newsletter.php ou sur notre nouvelle page facebook : https://www.facebook.com/profile.php?id=100070326842407

Nous avons abordé la semaine dernière une partie des raisons qui met les paysans en colère et les pousse parfois jusque dans leur derniers retranchements et pourquoi la concurrence de l’importation, les marges abusives des intermédiaires, les exigences de l’état et un manque flagrant de reconnaissance et de soutien tant financier que moral épuise même les plus résistants et décourage les jeunes (nous réservons sur ce point dans un prochain mail).

Mais comment en sommes nous arrivés là ?, pourquoi avoir choisi ce métier ?
Tout d’abord, la situation n’a pas toujours été ainsi: comme disait Fernand Raynaud : «C’a eu payé.. mais ca ne paie plus» . Il fut en effet un temps (pas si lointain) où l’agriculture était bio de nature et l’alimentation par définition locale et de saison. La production de l'alimentation occupait bien 30% de la population et représentait aussi 30 % du budget ménager. Bien des corps de ferme témoignent encore de cette "gloire" passée…

Avec l’avènement des pesticides, des engrais de synthèse et des tracteurs, une productivité sans précédent était devenue possible et le monde agricole s’est lancé dans la compétition de celui qui produit le plus et le mois cher, sans se rendre compte que que cela serait un auto-goal à long terme (et sans préoccupations environnementales qui n'étaient pas encore à l'ordre du jour). La compétition fut largement sponsorisée et encouragée par les industries, la grande distribution et les gouvernements. Aujourd’hui la grande distribution et les consommateurs sortent gagnants puisque le pouvoir d’achat du peuple a augmenté de manière à ce que les dépenses alimentaires ne dépassent guère 6-10 % de leur revenu (qu'on peut réinvestir dans les impôts, le coûts des soins et l'industrie sans cesse croissante du loisir.

Dans une compétition, c’est bien connu : seuls le(s) meilleur(s) gagne(nt). Or actuellement le haut de la compétition est détenu par l’agrobusiness et pour régater dans cette catégorie, l’héritage du domaine familial ne suffit de loin plus. (on reviendra sans doute aussi une autre fois sur les problèmes de l’agrobusiness)

Mais alors pourquoi avoir choisi ce métier si ingrat ? On ne devient pas paysan par attrait du gain, c’est évident.
Les motivations sont  plutôt de l’ordre de la perpétuation de la tradition familiale, un certain idéalisme à vouloir produire de quoi nourrir une population, une passion pour la terre et le monde rural. Mais attention : la passion est une flamme fragile, sans combustible elle s’éteint… elle est alors remplacée par deux choses : une certaine fierté à ne pas baisser les bras et l’obstination à continuer quoi qu’il advienne (hélas aussi sans remettre en question certains fondements)… et/ou une motivation plus terre à terre qui vous enserre comme un étau : l’endettement.

De fait, l’agriculture et son productivisme moderne repose sur des machine souvent surdimensionnées et high-tech. Pour survivre dans le marché actuel, il faut produire plus pour moins cher, soit gérer plus de surface avec moins de main d’œuvre. Parvenir à ce résultat demande de gros investissements et par conséquent de gros crédits à rembourser. Les gros tracteurs et machines coûtent de plus cher à l’entretien .. à tel point que le prix de vente de la production ne couvre généralement qu’à peine plus que les coûts de fonctionnement de l’exploitation. En Suisse comme ailleurs.

Dès que le premier investissement est fait, il faut donc produire plus pour rembourser et investir pour produire plus.. Ce n’est pas parce que c’est une spirale infernale et un piège dont il est difficile de s’extraire que ce mode de fonctionnement n’est pas considéré comme «normal» , enseigné par les écoles agricoles, plébiscité par les organisations de conseil rural et bien sur promu et soutenu par des investisseurs de la grande distribution qui peuvent ainsi s’assurer une main mise et un avantage plus que décisif lors de négociations futures.
Il faut déjà être un brin conspirationniste afin d’envisager de nager à contre-courant et imaginer qu’une certaine décroissance pourrait constituer un changement de paradigme intéressant.

Nous disions donc que les recettes ne couvrent souvent que les frais de production (qui incluent évidemment le remboursement des crédits et l’entretien du parc machine). Mais de quoi vivent les paysans, alors ? Pour générer un revenu viable, la majorité dépendent de subsides, paiements directs ou autres contributions versés par les états. Vous retrouverez un système plus ou moins similaire dans presque tous les pays du monde.
L’avantage pour les Etats est qu’ils peuvent ajouter des conditions à l’octroi de ces subsides.Bien que ces conditions ne soient pas des lois, le non respect entraînerait presque immanquablement l’exploitation du bord de la faillite (ou au delà). Le paysan moyen, bien qu'on lui rappelle régulièrement qu'il est entrepreneur et doit assumer ses responsabilités a donc en réalité les pieds et mains liés...

C’est ici qu’on arrive dans des valeurs un peu ambiguës : bien souvent (et de plus en plus) les susmentionnées conditions sont en faveur de l'environnement et de la protection des animaux (tout est relatif..) . C’est donc positif, alors de quoi se plaint-on ?
Il est d’une part difficile de vérifier le respect de ces conditions sans une certaine charge administrative et d’autre part le respect de ces conditions entraîne une baisse de productivité et donc de revenu. Les montants alloués pour ces aides varient dans le temps et ne sont pas garantis sur du long terme (difficile de vivre avec ces incertitudes et investir sur du long terme sans savoir de quoi demain sera fait..). De fait, les conditions d’attribution et les montant changent au fil des révisions de la politique agricole, politique décidée par des personnes en costard-cravate qui n’ont certainement jamais enfilé de bottes le matin pour se rendre au travail.
L’agriculteur devient une sorte de marionnette dont les fils sont tenus d’un côté par l’Etat de l’autre par l’industrie de la grande distribution. (je vous laisse décider qui a la droite et qui la gauche)

On retrouve l’absence de valorisation du travail effectif (qui consiste à produire l’alimentation de base et non pas à remplir des formulaires), la perte de liberté, le maintien dans une certaine précarité financière de laquelle il semble impossible de s’extraire… un petit cocktail d’éléments qui font que le communisme a échoué à motiver et rendre heureux ses camarades...alors que l’idéologie de base pourrait paraître louable.

Imaginez que votre job ne soit dorénavant plus payé qu’à 10.-/heure.. et qu’un complément de 15.-/heure vous sera versé par un fond étatique pour autant que vous puissiez fournir des justificatifs qui prouvent que vous vous rendez au bureau en transports publics ou à vélo, que vous teniez un journal de ce que vous avez cuisiné et que cela soit bien basé sur des produits locaux et de saison (cela doit être traçable..), que vous aménagiez des nichoirs verts sur vos balcons selon la norme NSB 520, et que vous ne portiez que des sous-vêtements en lin bio, chose qui peut être vérifiée à tout moment lors d’une inspection surprise, etc.. et lors de la prochaine révision de ce petit code, on ajoutera peut-être quelques conditions supplémentaires tout en diminuant peut-être le complément. Admettez que cela ne serait guère motivant et dévaloriserait certaines actions que vous faites peut-être déjà sur une base volontaire et que cette épée de Damoclès ne vous enchanterait guère…


Voilà pour le constat (d’une partie) du problème.. .pour ce qui est des solutions, c’est largement plus complexe. Soit dit au passage, si les paysans arrivaient à collaborer dans la vie de tous les jours comme ils arrivent à le faire pour afficher leur mécontentement, ils formeraient des coopératives et éjecteraient la grande distribution de la relation producteurs-consommateurs.
En même temps, avec des «si», on pourrait aussi résoudre le problème de la pollution, de la faim dans le monde, le conflit israélo-palestinien ou alors faire des choses plus futiles comme mettre Paris en bouteille...

En attendant, Si le monde ne s’effondre pas avant demain (jeudi), on va vous livrer un cabas de légumes, un petit pas vers une solution vaut peut-être plus que de grands discours. Donc essayons de rester positifs.